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NOS BERGES CADENASSÉES

ÉDITORIAL

par Gilbert Lavoie

LE SOLEIL, 20 juillet 1995

Le géographe Léonce Naud avait peut-être l'air excentrique, lundi, en plongeant dans les eaux du bassin Louise sous les yeux de quelques badauds et journalistes. Mais son geste devrait nous réveiller à une réalité qu'on oublie souvent à Québec: le public n'a pas accès aux plans d'eau de la région. C'est une véritable honte qui ne peut s'expliquer que par l'insouciance et l'ignorance des gouvernements et de nos administrations municipales des années passées.

Le fait que Léonce Naud s'intéresse à cette question depuis longtemps n'est pas étranger au fait qu'il ait vécu à Ottawa pendant quelques années. Il a pu y constater à quel point les planificateurs de la capitale nationale ont préservé des espaces pour le monde ordinaire autour de leurs points d'eau. Même Toronto pourrait nous faire la morale: grâce aux pressions de la population et de quelques élus, on a sauvegardé les berges des îles de la ville-reine pour le grand public. L'accès est gratuit.

On ne peut en dire autant de Québec. À l'exception de la plage Jacques-Cartier et des battures de Beauport, toutes nos rives ont été sacrifiées au développement immobilier, aux routes et aux marinas privées. Nos gouvernements n'ont même pas eu la sagesse de préserver certaines portions des rives de nos lacs pour utilisation publique. Les lacs Beauport, Saint-Joseph, Sergent et Sept-Îles sont ceinturés de propriétés privées. Il y a une plage municipale au lac Saint-Joseph, mais la municipalité exige $ 7 dollars par jour pour la baignade et $ 22 dollars pour la mise à l'eau d'une embarcation. C'est un coût exorbitant.

Sainte-Foy a fait des efforts louables en aménageant sa base de plein-air. C'est modeste comme opération, mais c'est tout de même une petite oasis dans une région où l'on a privilégié le béton et les autoroutes. On peut s'y baigner pour $ 3 dollars par jour, y faire du camping sauvage, louer des embarcations et même y taquiner la truite pour un prix fort abordable. Mais le tarif double si vous n'êtes pas un résident de la municipalité.

Les lacunes de la région ne se limitent pas aux plages publiques. Les propriétaires de petites embarcations n'ont pas plus d'accès aux plans d'eau que les baigneurs. Sillery est la seule ville où l'on peut encore utiliser gratuitement une rampe publique pour la mise à l'eau des petites embarcations, mais l'administration municipale planifie actuellement la mise en place d'une grille tarifaire.

Cap-Rouge exige $ 10 dollars de ses contribuables pour l'utilisation de sa rampe et $ 15 dollars des résidants des villes voisines. A Saint-Romuald, la marina privée exige $ 13 dollars pour l'utilisation de sa rampe qui n'est même pas pavée.

Bref, Québec est peut-être la plus belle ville au Canada, mais elle accuse un retard incroyable dans l'aménagement de ses rives et de son port. On constate incidemment le même retard dans la mise en place d'un réseau complet de pistes cyclables. Chaque municipalité a son bout de piste, mais il n'y a pas de véritable réseau régional.

Si la nouvelle Commission de la Capitale nationale, que le gouvernement Parizeau s'apprête à mettre sur pied, veut véritablement se mettre au service du monde ordinaire, elle devrait peut-être consacrer moins de temps à l'architecture et nous redonner un peu de nos espaces verts et de nos plans d'eau.